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La communauté universitaire à l’épreuve de l’établissement. - François Castaing, le 13 janvier 2012

mardi 17 janvier 2012, par airap8

La communauté universitaire à l’épreuve de l’établissement.

François Castaing, le 13 janvier 2012

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Nous avons décidé, au cours de notre premier débat public du 13 décembre 2011, de commencer notre cycle de réunions thématiques par une séance consacrée à la vie de l’établissement. Non que nous ignorions que celle-ci est en grande partie dépendante de l’environnement institutionnel et politique qu’il nous faut – souvent hélas – supporter, mais parce que la volonté d’assumer - sans y adhérer - le poids des réalités qui s’imposent de l’extérieur ne saurait nous conduire à renoncer à nos propres capacités d’initiative et à nos convictions. =======================

Un choix stratégique

Dans quelques mois les conseils centraux vont être renouvelés. Le débat qui est dorénavant lancé, avec des points de vue plus que contradictoires, révèlent au moins trois choix possibles :  Celui du renoncement, qui conduit à s’accommoder des nouvelles règles qui réduisent les espaces institutionnels et les vident de tout caractère démocratique, en définissant l’établissement comme un lieu de stricte gestion d’ailleurs putativement éphémère (l’avenir n’étant plus l’échelle de l’établissement mais celui des regroupements inter- universitaires à vocation fusionnelle).  Celui du repli dans une opposition qui peut être loquace, sans doute un peu stérile en ce qu’elle tend à vouloir assimiler toute responsabilité décisionnelle comme assimilable au renoncement ci-dessus évoqué ; les principes sont saufs, en théorie, mais ne trouvent plus de lieux pour s’exercer hors son pré carré.  Un troisième choix possible consiste à s’assurer d’abord de ses convictions, au-delà des contraintes de la quotidienneté professionnelle pourtant soumise à rude épreuve, à s’en emparer pour se confronter aux contradictions entre nos engagements et les contraintes de la vie institutionnelle pour porter des pratiques qui préservent une pluralité de choix, des réversibilités que nous espérons encore possible malgré un paysage politique d’ensemble qui ne porte pas toujours à enthousiasme, pour porter la responsabilité de l’intérêt général incarné encore à nos yeux par le sens du service public. Evidemment, ce troisième choix prête le flanc aux critiques des deux bords. Il est, par définition, inconfortable. Il se situe – et tente de l’assumer - au cœur de contradictions. Il peut même alimenter des contributions appelant au débat qui, à bien les lire, ne sont guère structurées que par une suspicion à l’égard de ceux qui ont fait ce choix sans avoir à dire ce que seraient les leurs. Il est alors facile de jouer de la nuance entre compromis et compromissions pour déclamer que l’on ne mange pas de ce pain là.

Nous en reparlerons sans doute à l’occasion des prochaines séances consacrées à la recherche ou à la formation. Puisque le choix a été fait de commencer par la vie de l’établissement, je centrerai cette contribution individuelle autour de celle-ci.

L’établissement, une échelle pertinente ?

En premier lieu, une des questions qui nous est posée est celle de la pertinence ou non de cette échelle qu’est l’établissement. La pluralité des espaces dans lesquels nous exerçons nos activités est source de nombre de contradictions. Nous connaissons l’échelle de la formation où nous enseignons et où nous mettons en œuvre notre « art » d’enseigner. Cela peut recouvrir la notion de département mais ne va pas toujours jusqu’à atteindre celle d’UFR. Les collègues – et les étudiants - avec lesquels nous travaillons ne sont pas ou pas toujours les mêmes que ceux que nous côtoyons à travers l’activité de recherche, activité qui doit s’insérer par ailleurs dans celle du laboratoire ou de l’équipe qui souvent dépasse le cadre de nos propres recherche. Et que dire dans le cas d’UMR. L’encadrement des thèses induit le rapport à l’échelle des écoles doctorales auxquelles sont rattachées les équipes. S’ajoutent à cela les responsabilités que l’on est amené à prendre où les instances dans lesquelles on est amené à participer (conseils d’UFR, de labos, comités consultatifs, conseils centraux, jurys, Cnu, Msh, Condorcet, etc). Les degrés d’implication, les choix d’investissement des uns et des autres, les trajectoires professionnelles conduisent à des vécus, et donc à des pratiques sociales, extrêmement diversifiés. La réalité, et a fortiori la représentation de celle-ci, sont disparates. L’existence d’une communauté universitaire peut-elle résister à cela ? Il faut ajouter que les politiques actuelles de « big is beautiful » (Shangaï oblige) et de gestion concurrentielle au détriment du collaboratif sont un facteur d’éclatement supplémentaire. Nous en reparlerons sans doute à propos de la recherche et des partenariats

La collégialité, comme émanation d’une communauté des pairs, a un sens dés lors qu’elle s’appuie et permet des pratiques et des références communes à l’échelle d’un territoire qui nous est commun. Elle est un obstacle – et réciproquement - à des prises de décision unilatérales, autoritaires, déconnectées des pratiques. Mais en même temps, elle ne va pas de soi. Elle n’est pas en elle-même démocratique, pas plus que la gestion des pairs est un idéal absolu. Elle ne règle pas en soi les questions relatives aux choix à faire, aux arbitrages à réaliser. La référence à la collégialité – et dont on ne définit pas clairement les contours - ne permet pas de s’exempter d’une réflexion sur l’articulation entre ce qui fait la communauté universitaire et l’existence d’instances délibératives élues pas plus que celles-ci ne doivent ignorer l’importance de celle-là.

Trois enjeux

L’enjeu de ce débat est donc à mon sens triple :
-  à l’heure des grandes reconfigurations, au sein desquelles l’établissement au sens universitaire serait voué à disparaître, alors même que l’échelle de l’établissement ne s’impose pas comme réalité perceptible à tous, faut-il ou non défendre cet échelon du système universitaire ? Je crois nécessaire la réponse positive car il est un échelon « maîtrisable » à l’échelle d’une communauté comme la nôtre, il est à portée de notre pouvoir d’agir.

-  La collégialité, comme émanation d’une communauté universitaire en tant que réalité vécue et perceptible à l’échelle de l’établissement, est extrêmement fragile. Protéger (ce que nous avons tenté de faire), et même à certains égards construire cette communauté universitaire me semble un préalable à une collégialité qui ne peut couvrir tous les domaines de la prise de décision. C’est le sens que doivent recouvrir les propositions à venir.

-  Les instances universitaires, par le rôle qu’elles doivent jouer dans l’impulsion des débats, des choix stratégiques et des décisions à prendre doivent être mieux articulées entre elles afin de résister autant que faire se peut aux logiques insistantes de centralisation des prises de décision.

Des propositions à élaborer

A partir de ces préoccupations, toute une série de questions peuvent être déclinées :

- comment mieux contribuer à la circulation et au partage des infos, comment assurer un accès plus facile aux informations d’ordre décisionnelles mais aussi à toutes celles utiles pour que puissent se mener les débats, comment assurer qu’elles circulent dans les deux sens ? Toute information n’est pas une information actant une décision mais il y a aussi toutes celles qui relèvent du débat nécessaire dans le cadre du processus de prise de décision et qui peuvent avoir toute leur place sur l’ENT.

- la question des lieux de circulation de l’info, mais aussi de confrontations, débats, appropriations, etc. En réalité, derrière cette question, nous retrouvons la notion de communauté universitaire qui ne peut avoir de sens si elle n’a pas des lieux d’existence pratique. Ces lieux renvoient pour certains à des instances (UFR, Labos, directeurs d’UFR et de labos, comités consultatifs, etc) mais aussi des lieux pratiques qui n’ont pas d’existence statutaire (au sens juridique) mais sont bien réels : les départements, les services, etc Il n’est pas sûr que cela se traduise en termes de propositions immédiates mais renvoient sans doute plus à la question des pratiques à instituer
- la question des instances consultatives ex paritaires (ct cpe chsct) : c’est sans doute un des chantiers à remettre à plat par la « force des choses ». Non seulement l’environnement institutionnel a été chamboulé (le paritarisme n’est plus la règle, c’est plutôt de l’ordre au pire de la « consultation » fût elle que formelle, au mieux un lieu de dialogue), mais il y a – de fait - un passif dans l’établissement, que chacun attribuera à l’autre, qui rend les évolutions immédiates difficiles.
- la question des instances délibératives (Cevu, Cs, Ca), en lien avec celle du bureau de l’université, relève non seulement du domaine évoqué de la circulation de l’information mais surtout de la question de leur articulation. Le bureau semble déconnecté des instances et ne pas apporter beaucoup du point de vue des lieux de délibération. Il faut sans aucun doute le repenser. La façon dont les délibérations des uns éclairent les délibérations des autres est importante. Enfin, la question de la lourdeur des tâches à assumer repose la question du partage et de la prise des responsabilités.

Il revient aux débats en cours que les propositions en viennent à de plus précises formulations. La lucidité nous impose de rappeler que ces choix, parce que peu compatibles avec les logiques managériales mises en œuvre depuis de nombreuses années maintenant, rend leur mise en œuvre difficile. Les procéduralisations à outrance émanant d’en haut ayant explicitement aussi pour rôle de corseter le temps et les espaces de débat. Sans compter leurs effets sur les conditions de travail (dont nous reparlerons). Avoir conscience de cela n’interdit pas de tout mettre en œuvre pour ne pas renoncer.

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